France : proposition historique de réserve Bitcoin stratégique

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📋 En bref (TL;DR)

  • Le député français Éric Ciotti propose une loi pour créer une réserve stratégique de Bitcoin de 420 000 BTC (2% de l’offre totale)
  • Financement innovant : 25% du Livret A (15M€/jour), minage via énergie nucléaire, et conservation des BTC saisis en justice
  • La France deviendrait la première nation européenne G7 à traiter le Bitcoin comme un actif stratégique national, au même titre que l’or
  • Défi politique majeur : le parti UDR ne dispose que de 16 sièges sur 577 à l’Assemblée nationale, rendant l’adoption improbable sans coalition large
  • Contexte international : USA (207k BTC), El Salvador (7,5k BTC) et Bhutan (13k BTC) ont déjà constitué des réserves nationales par des méthodes différentes

Le 28 octobre 2025, la France a franchi un cap historique. Le député Éric Ciotti a déposé une proposition de loi révolutionnaire à l’Assemblée nationale. Son objectif ? Faire de la France la première grande nation européenne à constituer une réserve stratégique de Bitcoin. Cette initiative, inscrite sous le numéro 1984, marque un tournant potentiel dans la relation entre les États et les cryptomonnaies. Alors que les débats font rage sur la régulation des actifs numériques, la France pourrait se positionner en pionnière. Mais cette proposition ambitieuse est-elle réaliste ?

La proposition Ciotti : 420 000 BTC pour la France

La proposition de loi d’Éric Ciotti ne fait pas les choses à moitié. Elle vise à acquérir 2% de l’offre totale de Bitcoin, soit environ 420 000 BTC, sur une période de sept à huit ans. Pour contextualiser, au prix actuel d’environ 90 000 dollars le Bitcoin, cela représenterait une valeur de près de 38 milliards de dollars. Un investissement colossal qui placerait la France parmi les plus grands détenteurs publics de Bitcoin au monde.

Concrètement, la proposition prévoit la création d’un Établissement Public Administratif (EPA). Cette structure gérerait la réserve nationale de Bitcoin, de manière similaire aux réserves d’or et de devises étrangères du pays. Le Bitcoin y serait traité comme un « or numérique », une réserve de valeur stratégique face aux turbulences monétaires. Cette analogie avec l’or n’est pas anodine. Elle vise à légitimer le Bitcoin aux yeux des institutions traditionnelles.

Un financement innovant via le Livret A et le nucléaire

Le point le plus audacieux de la proposition concerne le financement. Plutôt que de puiser directement dans les caisses de l’État, Éric Ciotti propose trois sources principales. La première : 25% des flux entrants du Livret A et du LDDS. Ces livrets d’épargne populaires collectent des milliards chaque année. Rediriger un quart de ces flux vers l’achat de Bitcoin représenterait environ 15 millions d’euros par jour. Au rythme actuel, cela permettrait d’acquérir environ 55 000 BTC par an.

La deuxième source de financement est tout aussi novatrice. La France produit 70% de son électricité via le nucléaire. Ce surplus d’énergie propre et stable serait utilisé pour le « mining » (minage) de Bitcoin. Cette approche transformerait l’énergie excédentaire en actif numérique. Le Bhutan utilise déjà ce modèle avec succès grâce à son hydroélectricité. La France pourrait ainsi miner des Bitcoin tout en valorisant son infrastructure énergétique existante. La proposition inclut même des adaptations fiscales pour les mineurs, notamment sur les taxes d’électricité (TURPE).

Enfin, troisième source : les Bitcoin saisis lors de procédures judiciaires. Actuellement, l’État français vend ces cryptomonnaies confisquées aux enchères. La proposition suggère de les conserver au sein de la réserve stratégique. Cette pratique s’aligne sur la stratégie américaine, qui a constitué l’essentiel de ses réserves via ce mécanisme.

Au-delà du Bitcoin : stablecoins et PEA crypto

La proposition ne se limite pas à la réserve de Bitcoin. Elle propose un cadre plus large pour l’adoption des cryptomonnaies en France. Notamment, elle suggère d’autoriser les paiements en stablecoins euros jusqu’à 200 euros par jour, sans déclenchement de fiscalité. Les stablecoins sont des cryptomonnaies indexées sur des devises traditionnelles. Cette mesure faciliterait les transactions quotidiennes en crypto.

Autre volet innovant : l’ouverture du Plan d’Épargne en Actions (PEA) aux cryptomonnaies. Les Français pourraient ainsi investir dans des ETN (Exchange Traded Notes) crypto via leur PEA. Cela démocratiserait l’accès aux actifs numériques tout en bénéficiant des avantages fiscaux du PEA. Un signal fort envoyé aux épargnants français.

Enfin, la proposition prend position contre l’euro numérique (CBDC) de la Banque Centrale Européenne. Ciotti demande son interdiction, arguant qu’il renforcerait l’influence de Francfort au détriment de la souveraineté nationale. Cette opposition reflète les craintes autour du contrôle centralisé de la monnaie. En savoir plus sur les signaux réglementaires positifs récents.

Comparaison internationale : où se situe la France ?

La France ne serait pas le premier pays à constituer une réserve nationale de Bitcoin. Plusieurs nations ont déjà pris ce chemin, chacune avec sa propre approche. Comparer ces stratégies permet de mieux saisir l’originalité de la proposition française.

Les États-Unis : de la saisie à la stratégie

Les États-Unis détiennent environ 207 000 BTC, principalement issus de saisies criminelles. Le FBI et d’autres agences ont confisqué ces Bitcoin lors d’opérations contre des plateformes illégales comme Silk Road. Longtemps, ces actifs étaient vendus aux enchères. Mais en mars 2025, le président Donald Trump a changé la donne. Via un décret exécutif, il a créé la Strategic Bitcoin Reserve. Désormais, tous les Bitcoin saisis sont centralisés et conservés comme réserve nationale.

Cette décision marque un virage majeur. Elle reconnaît le Bitcoin comme un actif stratégique légitime. Les États-Unis ne se contentent plus de tolérer les cryptomonnaies. Ils les intègrent à leur arsenal financier. Cette approche pragmatique inspire d’autres nations, dont potentiellement la France.

El Salvador : le pionnier sous pression

El Salvador reste le cas le plus emblématique. En 2021, le pays a adopté le Bitcoin comme monnaie légale. Une première mondiale. Le gouvernement a accumulé 7 474 BTC via des achats publics réguliers. Mais cette stratégie audacieuse a rencontré des obstacles. La pression du Fonds Monétaire International (FMI) s’est intensifiée. En échange d’un prêt de 1,4 milliard de dollars, le FMI a exigé la limitation de l’exposition publique au Bitcoin.

Résultat : en juillet 2025, El Salvador a annoncé l’arrêt des achats publics de Bitcoin. Le pays conserve ses réserves existantes, mais ne les accroît plus. Cette situation illustre les tensions entre souveraineté financière et dépendance aux institutions internationales. Un dilemme que la France, membre du G7, n’aurait pas à affronter de la même manière.

Bhutan : la discrétion payante

Le Bhutan, petit royaume himalayen, a adopté une stratégie discrète mais efficace. Via son fonds souverain Druk Holding and Investments, le pays mine du Bitcoin depuis plusieurs années. Il utilise son excédent d’hydroélectricité pour alimenter des fermes de minage. Résultat : le Bhutan détient environ 13 000 BTC, représentant près de 34% de son PIB.

Cette approche transforme l’énergie renouvelable en réserve numérique. Elle évite les achats sur les marchés, limitant l’exposition aux fluctuations de prix. Le Bhutan n’a pas attiré l’attention des institutions internationales. Sa méthode prouve qu’une nation peut constituer des réserves Bitcoin sans tapage médiatique. La France pourrait s’inspirer de ce modèle via son nucléaire.

Ces trois exemples montrent des trajectoires différentes. Les USA privilégient les saisies, El Salvador les achats directs, le Bhutan le minage. La proposition française combine les trois méthodes. Cette hybridation pourrait être sa force… ou sa faiblesse politique. Découvrez comment ces dynamiques s’inscrivent dans les cycles crypto.

Implications pour l’Europe et l’adoption crypto

Si la France adoptait cette proposition, les répercussions dépasseraient largement ses frontières. Ce serait un signal politique majeur pour toute l’Europe. Aucune autre grande nation européenne n’a encore franchi ce cap. L’Allemagne, pourtant détentrice de Bitcoin saisis, les vend systématiquement. L’Italie et l’Espagne restent en retrait. La France, en tant que membre du G7 et pilier de l’Union Européenne, donnerait une légitimité institutionnelle inédite au Bitcoin.

Cette légitimité pourrait déclencher un effet domino. D’autres pays européens pourraient suivre l’exemple français. La régulation MiCA (Markets in Crypto-Assets), entrée en vigueur en 2024, a déjà harmonisé les règles européennes sur les cryptomonnaies. Une réserve nationale française s’inscrirait dans ce cadre. Elle montrerait que régulation et adoption institutionnelle ne sont pas contradictoires. Au contraire, elles peuvent se renforcer mutuellement.

Sur le plan économique, la proposition pose la question de la souveraineté monétaire. En diversifiant ses réserves avec du Bitcoin, la France réduirait sa dépendance au dollar américain. Cette stratégie rejoint les réflexions sur les monnaies de réserve alternatives. Le Bitcoin, avec son offre limitée à 21 millions d’unités, apparaît comme une protection contre l’inflation et la dévaluation monétaire. Un argument qui résonne particulièrement après les politiques monétaires expansionnistes post-COVID.

Enfin, l’utilisation de l’énergie nucléaire pour le minage envoie un message fort. La France valoriserait son infrastructure énergétique unique en Europe. Cette synergie entre nucléaire et Bitcoin pourrait inspirer d’autres nations dotées d’énergie abondante. Elle répond aussi aux critiques écologiques souvent adressées au Bitcoin. Un minage basé sur le nucléaire et les renouvelables apparaît plus durable.

Les défis politiques et économiques

Malgré son ambition, la proposition Ciotti fait face à des obstacles majeurs. Le premier est politique. Le parti UDR ne dispose que de 16 députés sur 577 à l’Assemblée nationale. Une proportion infime. Pour que la proposition soit adoptée, elle devrait rallier une coalition large, incluant la gauche et la droite traditionnelles. Or, les positions sur le Bitcoin restent très clivées en France.

Les critiques ne manquent pas. Certains économistes dénoncent la volatilité du Bitcoin. Constituer une réserve nationale avec un actif dont le prix fluctue de 30% en quelques semaines semble risqué. D’autres soulignent le manque de régulation internationale. Le Bitcoin n’est adossé à aucune autorité centrale. En cas de crise, que ferait la France ? Ces interrogations légitimes freinent l’adhésion politique.

Sur le plan économique, l’utilisation du Livret A pose question. Ce livret finance notamment le logement social via la Caisse des Dépôts. Rediriger 25% des flux vers le Bitcoin pourrait affecter ces financements. Les syndicats et associations de locataires pourraient s’opposer fermement. Le gouvernement devrait arbitrer entre innovation financière et politique sociale.

Enfin, la proposition intervient dans un contexte européen complexe. La BCE (Banque Centrale Européenne) travaille sur l’euro numérique. La position anti-CBDC de Ciotti pourrait créer des tensions. Bruxelles verrait-elle d’un bon œil une initiative nationale aussi audacieuse ? La coordination européenne sur les questions monétaires reste sensible. Une initiative française unilatérale pourrait être perçue comme un défi à l’intégration européenne.

Malgré ces défis, la proposition a le mérite d’ouvrir le débat. Elle force les parlementaires et l’opinion publique à se positionner. Le Bitcoin doit-il rester cantonné aux portefeuilles privés ? Ou peut-il devenir un actif d’État ? Ces questions, longtemps ignorées, sont désormais sur la table. Peu importe l’issue du vote, la discussion a déjà commencé.

Conclusion : une proposition ambitieuse, un avenir incertain

La proposition de loi d’Éric Ciotti marque un tournant dans le débat français sur les cryptomonnaies. Pour la première fois, un texte aussi détaillé et ambitieux est déposé à l’Assemblée nationale. L’objectif d’acquérir 420 000 BTC ferait de la France un acteur majeur. Le financement innovant via le Livret A et le minage nucléaire propose une voie originale. Les mesures complémentaires sur les stablecoins et le PEA crypto montrent une vision d’ensemble.

Pourtant, les obstacles politiques et économiques restent considérables. Sans coalition large, la proposition a peu de chances d’aboutir. Les critiques sur la volatilité et les priorités budgétaires sont légitimes. Mais le simple fait d’avoir lancé ce débat est déjà une victoire. Il oblige la France à se positionner face à une révolution monétaire mondiale.

La comparaison internationale montre que différentes approches existent. Des États-Unis au Bhutan, chaque pays adapte sa stratégie à son contexte. La France pourrait tracer sa propre voie, combinant saisies, achats et minage. Que la proposition soit adoptée ou non, elle aura contribué à faire avancer la réflexion. Le Bitcoin n’est plus un sujet marginal. Il s’invite désormais dans les hémicycles. Et cela, en soi, est révolutionnaire.


📚 Glossaire

  • Bitcoin : Première cryptomonnaie créée en 2009 par Satoshi Nakamoto. Son offre est limitée à 21 millions d’unités, ce qui en fait un actif rare par conception.
  • Stablecoin : Cryptomonnaie dont la valeur est indexée sur une devise traditionnelle (euro, dollar) ou sur un actif stable. Exemples : USDC, USDT.
  • Mining (minage) : Processus informatique consistant à valider les transactions Bitcoin en résolvant des calculs complexes. Les mineurs sont récompensés en Bitcoin pour leur travail.
  • Réserve stratégique : Actifs détenus par un État pour assurer sa stabilité économique et financière. Traditionnellement composée d’or et de devises étrangères.

❓ Questions fréquentes

Pourquoi la France veut-elle créer une réserve Bitcoin ?

Pour diversifier ses réserves nationales et réduire sa dépendance au dollar. Le Bitcoin, avec son offre limitée, est vu comme une protection contre l’inflation. Cette initiative vise aussi à positionner la France comme pionnière en Europe.

Comment serait financée cette réserve de 420 000 BTC ?

Par trois moyens : 25% des flux du Livret A (15M€/jour), minage via énergie nucléaire excédentaire, et conservation des Bitcoin saisis en justice. Cette approche hybride évite de puiser directement dans le budget de l’État.

Quels pays détiennent déjà du Bitcoin comme réserve nationale ?

Les États-Unis (207 000 BTC via saisies), El Salvador (7 474 BTC via achats publics), et le Bhutan (13 000 BTC via minage hydroélectrique). Chaque pays utilise une stratégie différente adaptée à son contexte.

Cette proposition a-t-elle des chances d’être adoptée ?

Faibles à court terme. Le parti UDR ne dispose que de 16 sièges sur 577 à l’Assemblée. L’adoption nécessiterait une large coalition. Néanmoins, la proposition ouvre un débat politique important sur l’avenir des cryptomonnaies en France.

Le Bitcoin est-il trop volatil pour être une réserve nationale ?

C’est l’une des principales critiques. Le Bitcoin peut fluctuer de 30% en quelques semaines. Toutefois, sur le long terme (8+ ans), sa tendance reste haussière. Les défenseurs arguent que cette volatilité est le prix de la décentralisation et de l’indépendance monétaire.

Que deviendraient les financements du logement social si le Livret A finance du Bitcoin ?

Question cruciale. La proposition prévoit d’utiliser 25% des flux entrants, pas le stock existant. Mais cela pourrait réduire les nouveaux financements. Le gouvernement devrait arbitrer entre innovation financière et priorités sociales. C’est un point de tension majeur.

Quel serait l’impact sur l’Europe si la France adoptait cette loi ?

Un signal politique fort. La France, membre du G7, légitimerait le Bitcoin comme actif stratégique. D’autres pays européens pourraient suivre. Cela renforcerait aussi l’adoption institutionnelle des cryptomonnaies dans un cadre régulé (MiCA). En savoir plus sur l’adoption institutionnelle.


📚 Sources

Cet article s’appuie sur les sources suivantes :

  • Journal du Coin – Projet de loi inédit sur la crypto déposé par le parti d’Eric Ciotti
  • Cryptoast – Réserve française de bitcoins, cryptos en PEA, stablecoins euro
  • Bitcoin Magazine – France Proposes National Bitcoin Reserve
  • CoinDesk – El Salvador Buys 1,090 Bitcoin as IMF Pressure Mounts
  • Chainalysis – Bitcoin Strategic Reserves Analysis

Comment citer cet article :
Fibo Crypto. (2025). France : proposition historique de réserve Bitcoin stratégique. Consulté le 18 novembre 2025 sur https://fibo-crypto.fr/blog/france-reserve-bitcoin-strategique-eric-ciotti